20 septembre 2010

Notre classe politique et médiatique au plus bas !

Indigne, coûteux et inefficace, soit, mais tâchons au moins d’éviter le criminel !

La polémique avec l’Europe à propos des Roms serait le fruit d’une stratégie mûrement réfléchie par l’entourage de notre président et, d’après un membre dudit entourage, la commissaire Viviane Reding nous aurait rendu un fier service. Voire ! Les Français n’ont certes pas apprécié la maladresse de la commissaire européenne à la justice, aux droits fondamentaux et à la citoyenneté, qui devrait savoir, avec l’expérience politique qu’elle a, qu’il vaut mieux éviter de manipuler sans précaution des symboles aussi lourds que ceux de la Shoah et de la deuxième guerre mondiale. Mais un sondage paru dans le Parisien - Aujourd’hui en France nous apprend, ô surprise, qu’une majorité de Français donne raison à l’Europe et non à la France.
La patrie des Droits de l’Homme tolèrerait donc mal de voir des représentants de sa force publique expulser vers l’étranger des citoyens européens en situation régulière ? Cela lui rappellerait un passé sinistre où adultes et enfants innocents furent déportés pour cause d’appartenance à une race ? C’est tout à l’honneur de notre pays et c’est d’ailleurs tout ce qui lui reste en la matière. En effet quand des ministres du gouvernement mentent effrontément aux autorités européennes (dont l’autorité émane de traités internationaux signés par la France), quand des hauts fonctionnaires font fi des lois, soit en écrivant des directives scélérates , soit en privant de leurs droits fondamentaux de pauvres gens , quand par voie de conséquence les portes se ferment devant le président de la République, qui écourtera des trois quarts son séjour officiel à New-York, que nous reste t-il ? Peut-être l’honneur que peuvent nous apporter le civisme et le courage d’un petit nombre, prêt à se risquer pour faire passer les valeurs de l’humanisme avant la raison d’Etat. Merci aux Associations chrétiennes comme non chrétiennes (d’une part CIMADE, ACAT, CCFD, Secours catholique - Caritas, Fédération de l’Entraide Protestante et d’autre part SOS Racisme, Secours populaire, DIEM, DAL, MRAP, GISTI, Association « Contre la Double Peine »).

Au fond les contribuables devraient eux aussi protester. En effet, les mesures prises ne se bornent pas à être indignes de la France, elles sont également coûteuses et inefficaces : une fois payé les aides au retour et les charters, on assiste, impuissants, au retour des pauvres gens vers les zones où il y a quelque chose à manger, et donc au retour à la case départ ! Ca vaut bien la peine de se mettre à dos la moitié de l’humanité pour un tel résultat !
Mais la frénésie d’expulsion de l’Etat français ne s’arrête pas à des considérations rationnelles. Le magazine Envoyé spécial montrait dernièrement comment les déboutés du droit d’asile étaient renvoyés chez eux et dans quelle situation ils se trouvaient ensuite. Dans le cas des Afghans, l’administration française décrète comme « pacifiées » des régions contrôlées par les Taliban où les déboutés sont tout simplement livrés à la mort, soit rapide s’ils refusent de participer au Jihad avec les Talibans, soit lente car ce sont des tâches de kamikaze qui leur sont réservées. L’attitude du gouvernement français étonne les officiels afghans qui se demandent pourquoi des soldats de l’OTAN sont encore présents dans ces zones « pacifiées » et qui proposent avec ironie un petit voyage de découverte dans le secteur au ministre français de l’immigration. Le même reportage montrait aussi comment la police française essaie d’obtenir des désistements volontaires des procédures de demandes d’asile en promettant n’importe quoi aux demandeurs d’asile, par exemple un emploi dans leur pays d’origine ! On est largement dans le domaine de la mise en danger de la vie d’autrui, pas très loin de la complicité d’assassinat, en tous cas très au-delà de la non-assistance à personne en danger.

Mais l’indignité n’est pas l’apanage d’un seul parti. Que penser en effet de la lamentable campagne de presse visant un ministre et qui dure depuis plus de trois mois ? Il y a quelques semaines, un intéressant documentaire d’Yves Boisset sur l’affaire Salengro, sorti en 2009, nous était à nouveau proposé par la télévision publique. (Pour mémoire, fin 1936, le ministre de l'Intérieur du Front populaire, Roger Salengro, reconnu pour sa droiture, mettait fin à ses jours après des mois d’une violente campagne de la presse l’accusant sans aucune base d’avoir trahi la France pendant la première guerre mondiale.) Pendant le débat télévisé, on a bien entendu évoqué la mémoire de Pierre Bérégovoy, bien que son cas soit assez différent – hormis le fait que Pierre Bérégovoy s’était lui-même comparé à Roger Salengro ; Pierre Bérégovoy, un homme sans doute intrinsèquement honnête mais compromis par un entourage politique corrompu en profondeur, a été victime d’affaires bel et bien réelles. C’est plutôt la comparaison avec Eric Woerth qui s’imposait. Eric Woerth est en effet la cible d’un tir savamment dosé pour continuer longtemps et détruire à coup sûr, cela de la part d’une coterie de gauche, persuadée de servir ainsi une cause politique : gêner voire empêcher la réforme des retraites, tout comme Charles Maurras, Henri Béraud et Léon Daudet étaient persuadés de servir leur cause en torpillant le Front populaire et ses réformes par le biais de son maillon faible, Roger Salengro.
Salengro s’est suicidé parce que, dans les affaires de diffamation, le soupçon demeure même après que les preuves de l’innocence ont été apportées. Eric Woerth est-il innocent ? Il est permis de penser que, pour quelqu’un qui exerce des responsabilités politiques depuis si longtemps, on trouve bien peu de choses dans son passé, pourtant passé au peigne fin. Quelle que soit la réponse sur le fond, le procédé, dégueulasse, de la campagne de presse distillée pour blesser au maximum et pour tuer si possible, reste le même, et touche à vrai dire au criminel.

Dans ces deux affaires, la discrimination contre les Roms et la campagne anti-Woerth, on est curieusement revenus aux méthodes des années trente, violentes et amorales. Quand on se rappelle de ce à quoi ça nous a menés, cela appelle une vigilance renforcée sur fond d’une mobilisation civique massive !