24 janvier 2007

Campagne électorale : le choc du vide contre le néant

Le choc du vide contre le néant, est-ce là une nouvelle théorie relativiste ? Non, plus prosaïquement, il s'agit de l'image qui me vient à l'esprit s'agissant de la campagne électorale présidentielle française. Les media, fidèles à leur devoir d'information, se concentrent quasi-exclusivement sur les points essentiels des programmes des deux principaux candidats : qu'ont ils fait hier, à quelle heure se sont ils levés, quels vêtements ont-ils portés ... Où sont leurs idées ?

A ma gauche, le vide : Ségolène Royal n'a pas d'idées, car elle n'a pas encore fini de se les laisser dicter par l'opinion. Pour le moment, inutile d'essayer de savoir ce que pourrait contenir son programme ; d'ailleurs dès que quelqu'un s'essaie à le transcrire en termes concrets, il se plante, fût-ce un proche, voire un très proche. La douloureuse expérience a été faite par le compagnon de la candidate lui-même, pourtant peu suspect d'incompétence ès-socialisme et sur un sujet très socialiste : la fiscalité. Ségolène Royal a inventé et devrait breveter la candidature-miroir.

A ma droite, le néant : Nicolas Sarkozy. Le néant démocratique. Seules comptent les idées du Chef. C'est le règne de la première personne du singulier : j'ai décidé, j'ai compris, j'ai décidé... Nous sommes en pleine régression bonapartiste - ou boulangiste : dans le culte de la personnalité, on passe très vite du registre héroïque au registre tragi-comique. Ne posez pas de question au candidat bonapartiste, comme j'ai essayé de le faire il y a quelques mois : il ne vous répondra par un message standardisé qu'en retour de votre adhésion. Vos questions ridicules ne l'intéressent pas, elles le laissent de marbre, de ce marbre de dont on fera bientôt les statues qui rendront un hommage mérité au Chef.

Devons nous vraiment choisir entre la candidate-miroir et le candidat de marbre ? Entre "cause toujours" et "ferme ta gueule" ? La démocratie est-elle à ce point malade dans notre pays ?

Peut-être pas. Il y a une chose intelligente que nos concitoyens peuvent faire : boycotter au premier tour ces mauvais candidats et s'astreindre à choisir entre des candidats qui défendent des idées ou des convictions propres.

S'ils sont de gauche, ils le diront mieux en votant Marie-George Buffet. Le Parti communiste, même rénové, c'est une valeur sûre. Et puis même si elle affiche moins sa féminité que Ségolène, Marie-George n'en a pas moins de superbes yeux bleus.

S'ils sont de droite, hostiles à l'Europe, hostiles à l'immigration, ils oseront le vote Jean-Marie Le Pen. Là aussi, c'est une valeur sûre et le message passera.

Si enfin, ils sont partisans d'une société assez libérale pour encourager l'initiative et assez sociale pour protéger les plus faibles, partisans d'une intégration européenne raisonnée, bref s'ils veulent voir la France gouvernée au centre, ils voteront François Bayrou.

Si, manifestant une grande maturité politique, les Français envoyaient au deuxième tour deux des trois susnommés, nul doute que la classe politique progresserait rapidement et proposerait dès lors de vrais projets à l'électorat.