04 décembre 2007

La réconciliation franco-algérienne est-elle possible ?

Le président Sarkozy a fait en Algérie un discours marqué par moins de hardiesse que ce à quoi il nous avait habitués ; la question est certes épineuse, mais gagne-t-on pour autant à rester dans un flou artistique ? Il y a eu, nous dit-il, des victimes des deux côtés. Certes. Il faut que les historiens français et algériens mettent en chantier l'écriture d'une vision commune de l'Histoire basée sur les faits : oui, l'idée est excellente, voire indispensable. Mais ce qu'attendent les populations françaises et algériennes, les victimes des deux camps et leurs descendants, ce sont aussi des mots tout simples, qui montrent que les erreurs du passé sont comprises et que les vieux démons ne reviendront plus.

Ces mots simples, les Français d’aujourd’hui seraient au fond prêts à s’y associer. Il s’agit certes de pardon, mais non de repentance, ce mot trop lourd et trop religieux.
Ces paroles sont du style : nous avons fait mal à votre peuple, nous vous avons fait du mal de propos délibéré, nous le regrettons et nous vous en demandons pardon.

Quelles qu'en soient les causes historiques, les explications, les alibis, nous devons admettre que d'évidence, la France s'est trompée et a fait du tort tant à elle-même qu’aux populations vivant sur le sol algérien.

Elle s'est trompée en 1870 lorsqu'elle a promulgué le décret Crémieux, accordant la nationalité française d'office aux résidents chrétiens ou juifs et cantonnant les musulmans à un statut indigène. Ce faisant, elle a tourné le dos à l’idéal républicain et signifié à la majorité de la population d'une part leur statut colonial et d'autre part un mépris et une défiance coupables envers l'Islam. Diviser ainsi les peuples selon leur religion, c’était aussi tuer d’avance l’éventualité même d’une Algérie française, puisque ses habitants n’étaient pas admis à la citoyenneté. Un comble pour la patrie des droits de l’Homme, république laïque de surcroît.

La France s'est trompée ensuite en tombant dans le piège de la guerre dès mai 1945 en oubliant d'ouvrir ce dialogue qu’elle a recommandé à d’autres par la suite. Elle s'est trompée en utilisant dans ces opérations des techniques de guerre totale avec torture, déplacement de populations, etc. Elle s'est trompée en n'honorant pas sa parole vis à vis des harkis, dont beaucoup sont morts abandonnés à la vengeance des nationalistes.

Bref, moyennant quelques explications, la France d’aujourd’hui se reconnaîtrait plus volontiers dans une France généreuse qui demande pardon et qui pardonne que dans une France raidie dans un orgueil d’un autre siècle et qui nie les évidences historiques.

Monsieur le président, osons franchir le pas.